Physique

La petite délinquance s’habille de frusques et de sabots, la grande apprend à soigner son apparence pour se déguiser en société… Avec l’âge et l’expérience, Shadi s’est plutôt bien intégré au monde si coquet et frivole des vampires. Il habille sa silhouette grande et élancée d’une toge noire et ouvragée couverte ici et là de serpents dorés et de bijoux précieux, sans oublier bien sûr l’étoile du clan Tarak qu’il porte en pendentif, comme si sa peau brune de métis ne témoignait pas déjà de son appartenance au peuple de l’Oasis. Toujours chauve et tatoué dès son plus jeune âge un peu partout sur l’ensemble du corps, il prends grand soin de soigner sa démarche pour se mettre à distance raisonnable de son passé de voyou, non pas qu’il en ait honte, mais les membres de la haute méprisent souvent ceux qui viennent d’en bas.

La longue dague courbe à sa ceinture est la seule arme qu’il arbore, il n’a pas besoin de plus et se résout rarement à l’utiliser car il préfère parler et convaincre que de combattre de front… Pourtant sa vie de larcin a laissé sur son corps ciselé de nombreuses cicatrices que la malédiction des vampires n’a pas pu effacer, et son style de combat se rapproche bien plus de la baston de rue et de la capoeira que de l’escrime. Quand il se bat son visage est neutre, analytique, concentré, quand il discute il prends des atours plus taquins et charmeurs, ses yeux gris révèlent alors tout leur potentiel hypnotiseur. Shadi est un homme social et cela se ressent dans son langage corporel toujours parfaitement maîtrisé.

Psyché

Shadi est un être résolument amoral… Là où l’immoral cherche volontairement à aller contre toute forme de morale, Shadi se met en dehors d’elle et raisonne avec des termes qui lui semblent plus logiques et cohérents à utiliser, comme l’utilité, la valeur, le résultat ou l’intérêt. Cette mentalité n’est pas le fait d’une longue réflexion mais d’avantage les effets d’une éducation dans un milieu que tous jugent mauvais, vil et mortifère. Pour lui le crime est un travail comme une autre, ceux qui se trouvent dans ce corps de métier y sont souvent contraints par le destin ou par leur milieu et les juger revient à méconnaître totalement cette réalité sociale. Il est donc peu prompt à juger les actes des autres, il les jugera d’avantage sur ce qu’ils « sont », c’est à dire leur caractère, leur humour, leur intelligence ou leur compétence… Cela peut le rentre très insensible sur certains sujets comme la mort ou l’esclavage, bien qu’il tâche de faire attention à qui il parle de ces sujets avant d’exprimer son avis sur ces questions. Il y a cependant un point précis sur lequel il déroge à la règle : les prostituées et les esclaves sexuels. Ayant grandi dans un bordel et été élevé par des dizaines de ces femmes il prête à cette profession un immense respect et sera sans pitié envers quiconque tentera de leur nuire, peu importe leur clan ou leurs origines.

Bien que Shadi ne soit que très peu sentimental, la faute à son passé difficile, il n’en est pas pour autant cruel, désagréable ou mauvais. Sa vie humaine l’a a jamais marqué et il ne risque pas d’en oublier les leçons… C’est pourquoi il se montrera d’un naturel cordial et amical avec n’importe qui, qu’il fut humain ou vampire. A ses yeux la loyauté a bien plus de valeur et d’utilité que des trahisons mal préparées… Il cultive donc chaque relation sans se presser, offrant son aide et ses conseils si cela se révèle de bon aloi. Il a l’éternité pour mettre en place ses manigances, rien ne sert de tout accélérer et de changer ses meilleurs amis en ennemis mortels. En revanche il sait, en bon malandrin professionnel, que la bonne poire se fait toujours avoir, il condamne donc fermement ceux qui auraient la bêtise de la lui mettre à l’envers et ne leur accorde pas sa confiance une seconde fois.

Enfin Shadi pense avant tout à ses intérêts, à ce qu’il peut gagner et à la finalité de toutes ses actions, il est donc rare de le voir agir de façon réellement désintéressée ou qui puisse lui causer du tort… Si le faible est opprimé par le fort et qu’il se retrouve témoin d’une telle scène il passera sans doute son chemin à moins d’avoir une idée derrière la tête. L’ascension sociale passe avant tout, le reste n’est que du bonus parfaitement dispensable.

Pouvoir

Tout membre de la pègre un peu véreux vous le dira, les bons comptes font les bons amis ! Shadi a donc une méthode très simple pour s’assurer que chaque contrat soit honoré à la lettre… Tel un vicieux Djinn, il les imprime dans le sang de ses clients. Une fois les termes précis du contrat énoncés distinctement puis scellés par une poignée de main, le sortilège de magie noire s’active et le pacte faustien se déclenche. La paume de chaque contractant est dès lors recouverte d’une marque serpentine qui disparaîtra une fois que les deux parties auront honoré leur part du marché. Ce sortilège est très puissant mais il ne peut fonctionner que sur un contrat à la fois, d'autant qu'il est à double tranchant… Car dès lors que le sortilège fait effet, quiconque ne respectera pas sa part du contrat pourra être sévèrement puni. Pour cela rien de plus simple, il suffira de pincer la marque pour que celui qui a fauté entende résonner dans les méandres de son crâne le sifflement du cobra, cette migraine insupportable peut durer de façon illimitée, jusqu’à ce que la victime consente à remplir sa part du marché… Mais d’une part si le contractant qui s’est fait flouer n’est pas au courant des torts que son associé a commis, il ne peut le punir. D’autre part il y a beaucoup de techniques pour échapper à ses obligations. La première consiste simplement à s’éloigner suffisamment du contractant pour que le lien se brise… Cela  demande généralement de quitter la ville dans laquelle le contrat a eu lieu. La seconde consiste à se couper la main… C’est radical mais cela fonctionne, pour peu que la vie de manchot ne fasse pas peur à l’intéressé. La troisième implique tout bêtement de tuer l’autre contractant. Shadi connaît évidemment toutes ces subtilités, il a eu tout le loisir de les tester, mais le malheureux qui tombera dans le piège ne pourra peut être pas en dire autant.

Histoire

Prologue : Né dans la débauche.

Le crime est toujours tapi dans l’ombre du monde civilisé, aussi vrai que la nuit succède au jour. Les deux sont indissociables, plus l’on créée de lois, de codes et de règles, plus l’on incite les malins et les moins malins à tenter leur chance… Car croire qu’une société idyllique où tous sont heureux puisse exister relevait du fantasme ou de la naïveté. Aussi longtemps que la propriété existerait il y aurait toujours quelqu’un de plus haut que les autres… Et des tas de mécontents qui souhaiteraient posséder ce qu’il a. Comment avoir plus ? Voler bien sûr, mais tous n’ont pas l’audace ou l’assurance de s’y risquer… Acheter ce qui a été déjà volé par plus audacieux que soi ? Beaucoup seront frileux, mais si le marché noir était tout public cela se saurait. Mais il faudra malgré tout des petites mains pour obtenir les objets tant convoités… Là dessus on peut toujours compter sur des gamins facilement influençables et amoureux du danger ou sur des mendiants nécessiteux. Le chef d’orchestre chargé de recruter ces petites mains était un des hommes les plus importants dans le monde criminel de l’Oasis, et on l’appelait symboliquement le Roi des Mendiants. Sadham Al’Zahyr, dit le sévère, occupa quelques temps cette place convoitée… Et à force de profiter du luxe des bordels locaux il finit par engrosser une prostituée qui enfanta dans la douleur neuf mois plus tard, ainsi naquit Shadi.

Chapitre 1 : Petite enfance, douce enfance.

Choisir de mettre le pied dans l’engrenage du crime était une erreur, naître dedans sans choisir son destin était une tragédie, et celle de Shadi ne faisait que commencer… Les fils bâtards ne manquaient pas dans les bordels et il n’y avait pas beaucoup de pères pour aller les y chercher, Sadham, au vu de son titre, ne faisait pas exception dans son domaine. C’est donc en tant que garçon à tout faire auprès du directeur de l’établissement que le petit Shadi fit ses premiers pas, entouré de mamans plus ou moins attentionnées et de clients vicieux et lubriques, qu'ils soient humains ou non. En quoi consistaient ses tâches ? Ranger les chambres inoccupées et les vêtements usés, les laver et détrousser les imprudents qui commettraient l’erreur de s’assoupir trop longtemps dans le lit de leur partenaire. Pour certains s’habituer si jeune à une environnement pareil relevait de l’horrifique, pour Shadi cela devint vite un était de fait qu’il fallait accepter… Il était trop jeune pour faire autrement.

Chapitre 2 : Le portrait craché de son père.

Plus le temps passait et plus cela allait de mal en pis… Il goûta à tout, combats illégaux, cambriolages, racket et escroqueries, à à peine quatorze ans cette petite peste était aussi précoce qu’un bandit qui en aurait eu vingt, il cumulait autant de passages éclair dans les geôles de la ville que de pièces dans la poche, son jeune âge lui évitant des peines trop lourdes. Sa loyauté n’avait pas changé depuis lors, ses mamans étaient pour lui toute sa vie et chaque pièce qu’il obtenait illégalement c’était pour elles qu’il les récoltait. Loin d’abuser de sa gentillesse, ses collègues de travail lui offraient le gîte, le couvert et tous les potins nécessaires aux réussites de ses projets, car des petites histoires sur tout le gratin de l’Oasis, ces dames n’en manquaient pas. C’est à cette période que Shadi commença à s'intéresser un peu plus amplement aux vampires qui dirigeaient réellement l’endroit, ces êtres mythiques et immortels dotés d’immenses pouvoirs… Vivant dans les coins les plus mal famés du quartier il n’en avait pas vu beaucoup de ses propres yeux, mais l'inquiétante étrangeté qui les animait ne l'avait pas laissé de marbre… Il s’imaginait déjà en train de faire usage de ces pouvoirs démentiels pour ses propres intérêts et ceux de sa famille. C’est également l’année de ses quinze ans que l’une de ses mères adoptives laissa glisser, dans une grande maladresse, que parfois Shadi rappelait se comportait comme son bandit de père.

Chapitre 3 : Fléau du Roi.

Le désir de s’élever chez Shadi avait toujours été là, comme une innocente traînée de poudre qui ne demandait qu’à être allumée… La découverte de ses origines et de son père ne fut qu’une petite étincelle en comparaison. A présent il avait un but précis qui lui permettait de canaliser toutes ses ambitions enfouies. Il se ferait un nom dans le monde du crime et parviendrait à retrouver Sadham… Il obtiendrait une meilleure vie pour lui et pour ses nombreuses nourrices. Il s’exécuta donc avec toujours autant de détermination et d’astuce… Mais cela lui prit bien plus de temps, cette fois. Bientôt la majorité arriverait et il n’aurait plus le luxe de subir des peines légères, il serait tenu entièrement pour responsable de ses actes et à moins de graisser les bonnes pattes il ne s’en tirerait plus à si bon compte... Commettre des exactions plus dangereuses c’était commettre le risque d’attirer trop d’attention et de mettre sur lui des regards non nécessaires, notamment celui des capes pourpres. Ces agents vampiriques du maintien de l’ordre n’étaient pas très nombreux en Troublesprit, mais ils étaient sujets de beaucoup de légende urbaines dont Shadi ne voulait être le témoin pour rien au monde… Et pourtant. Quand l’ascension se termina à l’âge de ses vingt trois ans et que l’audience auprès de son maudit père était à portée de main, il eut le déplaisir de le rencontrer avec un pieu dans le cœur... Ceux qui l'avaient empalé et invitaient le jeune voleur à les rejoindre dans les quartiers du Roi étaient deux de ces brutes aux capes sanguines.

Chapitre 4 : La cour des grands.

Les informations furent dures à digérer, Shadi était sous le choc... Son père était devenu un vampire, et visiblement il avait bien mal agi. Sadham avait visé trop haut en voulant détrôner un duc, il en avait payé le prix… Les manteaux pourpres savaient que les règles du jeu à Troublesprit n’étaient pas les mêmes qu’à Haut Levant. Le monde libre ne pouvait pas être tenu par l’esclavage, en tous cas pas pour l'instant, il fallait donc des méthodes plus subtiles et laisser au peuple quelques miettes à becqueter. En somme le crime pouvait difficilement être éradiqué, du moment qu’un fantoche était là pour le contrôler et éviter qu’il ne déborde à l’extérieur, c’était acceptable. Sadham avait bien rempli ce rôle de pantin jusqu’à présent mais son avarice l’avait mené à vouloir plus… Mais peut être que son fils serait plus malin que lui. Ils firent une offre à Shadi. Prendre la place du macchabée et jouir des avantages qu’une telle position pouvait impliquer… Mais en échange il devait s’assurer que le crime resterait contrôlable... Et surtout il devait accepter de porter le collier, comme son père avant lui. Certains y verraient une forme de frustration, voire de castration, mais Shadi y voyait plutôt l’opportunité… Certes il perdait un peu de ses libertés, mais avec un peu de patience et de roublardise il pourrait bien vite rejoindre les favoris… Voire le rang tant désiré de vampire.

Chapitre 5 : Nouveaux horizons.

Ses calculs étaient les bons, cela avait pris cinq ans de plus mais à force de patience, de bonnes relations et de paroles enchanteresses le rang de favori fut acquis, et le vampirisme avec encore quelques années supplémentaires… Il était un peu trop vieux pour garder à jamais ses traits d’éphèbe mais le sérieux et la maturité d’un visage légèrement plus adulte ne le dérangeait pas nécessairement. Les décennies passèrent, elles ne furent que dédiées à deux choses, la recherche de connaissances et d’informations sur un monde qu’il ne pouvait voir que par le trou de la serrure et la protection de toutes les prostituées de l’Oasis… Deux tâches ardues mais qu’il tâchait d’accomplir avec le plus grand des sérieux. La seconde raison était évidemment affective, mais la première était d’avantage tournée vers l’avenir. Cela faisait presque trente ans à présent qu’il vivait dans l’oisiveté et dans les plaisirs simples, mais tout ceci n’était que dans l’optique de patienter, car bientôt le tunnel serait terminé et le mènerait à une nouvelle terre d’opportunités et de découvertes… Et il comptait bien y faire la même chose qu'à Troublesprit.